Bilan des litiges de la Fondation Wikimédia en 2024: Défendre les projets et les bénévoles de Wikimédia devant les tribunaux, et façonner l’avenir d’Internet

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En 2024, la Fondation Wikimedia a participé à des affaires judiciaires, soit en tant que prévenue ou en tant qu’acteur actif dans le cadre de litiges d’impact (c’est-à-dire des actions en justice visant à obtenir des changements juridiques dans l’intérêt public). La Fondation recherche, à l’échelle mondiale, des opportunités pour protéger juridiquement la connaissance libre, les bénévoles de Wikimédia qui y contribuent, et pour clarifier quels contenus font partie du patrimoine commun de connaissances partagées. Cet article de blog met en lumière certaines de nos actions menées l’année dernière pour protéger la connaissance libre et ouverte au sens large, et plus particulièrement les bénévoles et les projets de Wikimédia.

A photograph of the Justice statue by John van Nost the Younger on the Gates of Fortitude and Justice at Dublin Castle
Statue de la Justice de John van Nost le Jeune, sur les portes de la force et de la justice au château de Dublin.
Image de Jan-Herm Janßen, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons.

La mission de la Fondation Wikimedia est de renforcer et de mobiliser les citoyens du monde entier afin de développer des contenus encyclopédiques libres et ouverts, accessibles et partagés par tous, partout dans le monde. Nous contribuons notamment à cette mission en améliorant les lois et réglementations qui permettent d’héberger Wikipédia et les autres projets Wikimédia de partage de connaissances libres, ainsi que celles qui permettent aux communautés de bénévoles de Wikimédia de collaborer et de contribuer efficacement à ces projets.

Il y a deux manières principales par lesquelles nos actions en justice garantissent que le paysage juridique protège et promeuve les contributions à la connaissance libre et ouverte, et le modèle de gouvernance et de modération de contenu piloté par la communauté des projets. Premièrement, en tant qu’hébergeur des projets, nous répondons aux demandes juridiques liées à ces derniers afin de les défendre. Deuxièmement, nous menons des actions en justice ciblées à impact – des dépôts de plaintes stratégiques visant à instaurer des changements juridiques dans l’intérêt public – en déposant, par exemple, des mémoires d’amicus (“ami de la cour”) dans le cadre de procès importants et faisant jurisprudence, qui concernent des tiers dans le monde entier et pourraient impacter le contenu des projets ou les bénévoles. Cet article de blog explique la stratégie liée à nos actions en justice à un moment où, globalement, les procès auxquels nous avons participé dressent un tableau plus complexe de l’environnement juridique que jamais auparavant.

Il existe en ce moment des tendances gouvernementales à une surveillance accrue et à l’application de lois qui remettent en cause le concept d’un Internet libre, mondial et ouvert. Ces tendances ont commencé à modifier les types de demandes juridiques adressées à la Fondation et les attentes des pays du monde entier: Non seulement pour la Fondation, mais aussi pour tous les hébergeurs de plateformes. En 2024, notre service juridique a été impliqué dans des litiges, soit en tant que prévenu ou comme tiers, dans des litiges à impact au niveau mondiale. Nous avons été impliqués dans diverses affaires portant sur la protection de la responsabilité des intermédiaires, la diffamation, la liberté d’expression et le droit à la vie privée. Parmi ces affaires, nous considérons certaines comme des poursuites stratégiques contre la procédure-bâillon (SLAPP) – des poursuites visant à censurer des informations sur des questions légitimes d’intérêt public – tant du point de vue des litiges d’impact que des litiges défensifs. Dans toutes ces affaires, nous nous efforçons de protéger et de promouvoir la liberté d’expression, l’intérêt public à travers les projets Wikimédia et d’autres plateformes d’intérêt public communautaires similaires, ainsi que les avantages d’un paysage d’information en ligne fiable et précis.

Défendre les projets Wikimedia et ses bénévoles, et élaborer des lois pour protéger et promouvoir la connaissance libre.

Litige défensif: Protéger les projets Wikimédia et les bénévoles devant les tribunaux.

La Fondation et les communautés de bénévoles veillent à ce que les projets de Wikimédia ne soient pas soumis à des poursuites judiciaires. Néanmoins, des poursuites concernant le contenu de ces projets peuvent survenir. Lorsque celles-ci nous parviennent, où que nous soyons dans le monde, nous engageons des actions en justice défensives afin de protéger les projets et les personnes qui les modifient de bonne foi. Nous cherchons également à clarifier la loi afin d’aider les bénévoles, où qu’ils soient, à comprendre quels contenus sont disponibles en libre accès et quels sont ceux qui peuvent être restreints ou illégaux.

Lorsque nous recevons un nouveau cas, nous nous assurons toujours de bien comprendre le contenu litigieux, car la qualité du travail mené par la communauté est essentielle à la protection des projets. Par exemple, lorsque des passages controversés d’un article Wikipédia sont rédigés conformément à la politique d’une communauté bénévole, avec un point de vue neutre et des sources fiables, la Fondation est généralement bien placée pour défendre à la fois le contenu et ses auteurs. En revanche, si l’article est sans source ou qu’elles sont inexactes, la Fondation est très rarement en mesure d’enquêter de manière indépendante et de prouver son exactitude, ce qui rend sa défense difficile.

De même, si le contenu de Wikipédia, Wikimedia Commons, Wikidata ou d’autres projets fournit des informations sur la vie privée d’une personne, il est important que nous puissions démontrer sa valeur pour le public. Il est donc crucial que les communautés de bénévoles continuent de définir, de débattre et d’appliquer des normes équilibrées concernant le respect proportionné de la vie privée (par exemple, sur Wikidata et Wikipédia en anglais), la valeur éducative du contenu et l’utilisation d’images de personnes identifiables, comme elles le font avec tant de succès depuis 24 ans. En particulier lorsque des évaluations communautaires rigoureuses et équitables sont menées ouvertement, comme sur les pages de discussion et lors des discussions sur la suppression, les avocats de la Fondation seront en mesure de démontrer à nos adversaires juridiques, aux autorités de régulation et aux juges que la vie privée et l’intérêt public ont déjà été pleinement pesés et que, dans l’ensemble, la loi devrait protéger les contributions des bénévoles de Wikimédia.

Poursuites judiciaires en 2024

L’année dernière, la Fondation a fait l’objet de plusieurs poursuites et actions en justice. Nos rapports de transparence indiquent le nombre de demandes que nous recevons, en distinguant celles liées au contenu et celles liées aux données des utilisateurs. Si la grande majorité des plaintes déposées auprès de la Fondation n’aboutissent pas à un procès, la situation juridique de l’hébergement d’une plateforme a commencé à évoluer significativement. Le modèle de Wikimédia contribue grandement à résoudre les demandes en justice, car nous pouvons informer les opposants potentiels des processus communautaires susceptibles de répondre à leurs préoccupations – comme l’assistant de demande de modification sur la version anglaise de Wikipédia – et, parfois, nous pouvons même relayer la plainte directement aux membres de la communauté au nom du demandeur. Un petit nombre de cas présentent une obligation légale claire pour la Fondation, ce qui permet à certaines demandes d’être acceptées conformément à la loi. Jusqu’à présent, seules quelques plaintes chaque année donnent lieu à un procès.

Il est important de noter que certains litiges défensifs ne peuvent être évoqués publiquement: Cela varie selon les normes nationales et la nature de l’affaire. Par exemple, la Fondation peut avoir une capacité limitée à répéter des accusations déjà jugées diffamatoires par un tribunal, ou ne pas être en mesure de discuter les détails d’affaires toujours en cours. Heureusement, il existe quelques cas où nous pouvons souligner des victoires clés pour la protection des projets et des bénévoles.

La Fondation a remporté plusieurs victoires juridiques en Allemagne en 2024. Nous avons remporté une affaire de protection de la vie privée contre un riche magnat du jeu. Ce dernier, dans ce que nous considérons comme une poursuite-bâillon et sur la base de vagues allégations de préjudice potentiel, a tenté d’élargir considérablement la portée des lois allemandes et européennes sur la protection de la vie privée afin de nous contraindre à censurer les références factuelles et neutres le concernant sur Wikipédia. Nous avons également remporté un procès clé qui dissuadera les personnes du monde entier de tenter de profiter des règles allemandes strictes en matière de diffamation, dans ce que nous considérons comme l’un des rares cas flagrants de “forum shopping” auxquels nous avons été confrontés récemment.

Le “forum shopping” consiste à tenter de choisir un tribunal dans une juridiction dont les lois pourraient être plus favorables au plaignant. Nous avons remporté une autre affaire similaire au Royaume-Uni, intentée par un ancien avocat qui avait perdu son procès en diffamation contre nous devant la Haute Cour d’Angleterre et du Pays de Galles, puis avait tenté de faire appel de la décision. En mars 2025, la Cour d’appel a rejeté catégoriquement sa tentative et a confirmé la décision de la Haute Cour, avec une conclusion importante: Un délai de prescription de 12 mois peut toujours protéger les articles Wikipédia modifiés ou annulés, tant que le résultat est “substantiellement le même” que les passages litigieux rédigés il y a moins d’un an. Le juge Warby a déclaré de nombreux aspects de l’affaire de l’ancien avocat “totalement dénués de fondement” et a averti que le plaignant pourrait se voir infliger une injonction de ne pas faire s’il menaçait de porter d’autres plaintes infondées.

Nous avons également remporté des succès majeurs en matière de données utilisateurs cette année, même si nous ne les analysons pas individuellement afin d’éviter toute spéculation ou tentative d’identification des utilisateurs par le biais des détails de l’affaire. Globalement, la Fondation a mené deux affaires au Japon où elle a réussi à se protéger contre la divulgation des données utilisateurs. De même, une affaire au Brésil nous a permis de nous protéger contre la divulgation des données utilisateurs. En Inde, la Fondation a conclu un accord judiciaire pour poursuivre une affaire sans communiquer les données utilisateurs à la partie adverse.

L’affaire César do Paço au Portugal, dont la procédure devant la juridiction supérieure a considérablement ralenti sur des questions de droit portugais, reste ouverte et soulève de nombreuses questions liées à la protection de la vie privée des utilisateurs et à la protection des plateformes d’hébergement. Il s’agit d’une autre affaire que nous avons déjà identifiée comme une tentative de poursuite-bâillon. Dans ce cas, la Fondation veille à ce que les rédacteurs puissent travailler en toute sécurité sur des biographies importantes, notamment celles de personnalités politiques et financières, et les améliorer.

Enfin, en Inde, nous avons également obtenu l’abandon d’une action en justice concernant un documentaire de la BBC sur le Premier ministre indien, Narendra Modi. Le contenu en question n’avait jamais été hébergé sur Wikipédia. Il y était simplement cité comme source.

Nous avons également connu quelques revers l’année dernière. En France, deux procès ont opposé des opinions divergentes de la part des tribunaux français, ce qui a conduit la Fondation à supprimer deux articles conformément à ses obligations légales. Nous avons également entamé des discussions avec la communauté française sur la manière d’aborder ces questions. Nous encourageons souvent les communautés locales de bénévoles à travailler sur des contenus susceptibles de faire l’objet d’un litige: Les communautés ont presque toujours plus de possibilités que la Fondation si elles souhaitent travailler sur des articles soumis à une décision de justice. Par exemple, une suppression et une réécriture partielles peuvent être conformes à une décision de justice, tandis que la Fondation ne rédige jamais de nouveaux articles en réponse à une décision de justice et ne peut supprimer un article que sur décision de justice.

Nous avons aussi plusieurs affaires en cours, qui n’ont pas encore été définitivement tranchées. En Inde, l’affaire Asian News International (ANI) est toujours en cours, la prochaine audience étant reportée à mai 2025. En Italie, nous menons une procédure judiciaire concernant une ordonnance de non-indexation d’un article Wikipédia relatif à un haut responsable du Vatican accusé de possession de pornographie infantile. Cet aspect est important pour le partage des connaissances, car la déréférencement est devenue une nouvelle approche pour ceux qui cherchent à dissimuler des informations au public grâce au “droit à l’oubli” – l’idée étant que si elles restent hors des recherches, elles restent pratiquement secrètes, même si elles restent publiées quelque part. Nous avons également quelques affaires en cours en France et en Allemagne, ainsi qu’une affaire ouverte en Ukraine, à laquelle nous avons été ajoutés en cours de traitement.

Par ailleurs, nous suivons de très près une nouvelle vague de lois sur la “sécurité en ligne” à travers le monde – des lois conçues avec de bonnes intentions, mais souvent inadaptées à la diversité des services en ligne. Partout où de telles lois pourraient représenter une menace pour le modèle Wikimédia, il est possible que certaines questions juridiques doivent être résolues par les tribunaux.

Litiges d’impact: Ramener des changements juridiques dans l’intérêt public

Les dossiers juridiques stratégiques que la Fondation soumet aux tribunaux du monde entier visent à faire évoluer la législation dans l’intérêt public, afin de promouvoir et de protéger les projets Wikimédia et les communautés de bénévoles qui y contribuent.

Notre mission couvre de nombreux aspects importants du droit, c’est pourquoi les mémoires d’amicus curiae que nous déposons portent sur une grande variété de sujets. Par exemple, nous veillons à ce que le contenu créé, partagé, organisé et modéré en ligne reste accessible à ceux qui s’y intéressent. De plus, nous veillons à ce que les lois et réglementations n’empiètent pas sur les libertés qui protègent les utilisateurs des projets, ni sur leur capacité à chercher et à partager des connaissances libres et ouvertes. Par exemple, nous défendons l’idée que les lois efficaces ne doivent pas être utilisées pour restreindre la liberté d’expression dans des poursuites-bâillons. Enfin, nous veillons à ce que les normes juridiques, telles que la protection de la responsabilité des hébergeurs de plateformes, restent cohérentes partout dans le monde afin de protéger efficacement les plateformes concernées.

Mémoires d’amicus en 2024

NetChoice, LLC c. Paxton et Moody c. NetChoice, LLC sont deux des affaires récentes les plus importantes aux États-Unis (USA) par rapport au modèle de gouvernance et de modération de contenu communautaire de Wikipédia, ainsi que le droit à la liberté d’expression. En 2021, le Texas et la Floride ont adopté des lois visant à restreindre la capacité des plateformes de médias sociaux à appliquer leurs propres politiques de contenu. Ces lois répondaient à certaines décisions de modération de contenu très médiatisées prises par de grandes plateformes de médias sociaux, qui, selon les États, constituaient une censure du point de vue de certains utilisateurs. La Fondation a déposé un mémoire d’amicus curiae fin 2023 auprès de la cour suprême des États-Unis, dans lequel elle a fait valoir que les lois restreignant la modération de contenu communautaire porteraient atteinte aux droits des bénévoles de Wikipédia garantis par le Premier Amendement des États-Unis et pourraient nuire à la qualité et à la fiabilité de Wikipédia en les obligeant à inclure du contenu non encyclopédique.

Pour l’instant, la question reste posée: En juillet 2024, la cour suprême a jugé que les tribunaux inférieurs, lors de leur première décision sur ces affaires, avaient adopté une approche trop restrictive pour examiner l’impact constitutionnel de ces lois étatiques. La cour a renvoyé les affaires aux tribunaux inférieurs avec pour instruction de réessayer, ce qui revient à réinitialiser le système. Cela a suspendu l’application des lois jusqu’à ce que les tribunaux inférieurs statuent à nouveau.

La Fondation a déposé un mémoire d’amicus curiae conjoint avec Creative Commons et le Projet Gutenberg dans le cadre d’un autre procès américain, crucial pour l’hébergement de contenu sur les plateformes: Hachette c. Internet Archive. Quatre grands éditeurs ont accusé Internet Archive d’encourager la violation du droit d’auteur via son service Open Library. Face à la fermeture des bibliothèques et des librairies physiques due à la pandémie de COVID-19, Internet Archive a décidé de lever les restrictions de prêt sur les 1,4 million de livres numérisés qu’elle prêtait au public. Un tribunal de district américain a jugé inadmissible la défense de l’association fondée sur l’usage équitable, soulignant que la sollicitation de dons par Internet Archive était un facteur suffisamment important pour conclure que les œuvres protégées par le droit d’auteur étaient exploitées d’une manière préjudiciable aux propriétaires des œuvres protégées. Nous avons soutenu que l’interprétation de l’usage équitable par le tribunal pourrait qualifier à tort les utilisations secondaires à but non lucratif de commerciales, ce qui aurait des conséquences sur la capacité de toutes les organisations à but non lucratif à utiliser du matériel protégé par le droit d’auteur, y compris Wikipédia. Bien qu’Internet Archive ait finalement perdu ce procès, lorsque la cour d’appel des États-Unis pour le deuxième circuit a confirmé la décision du tribunal de district, la cour d’appel a jugé que la sollicitation de dons ne constituait pas une utilisation commerciale.

Comme expliqué auparavant, garantir l’accessibilité aux contenus d’intérêt public fait partie intégrante de notre mission. C’est pourquoi nous avons cosigné un mémoire d’amicus curiae avec Pinterest, Google et l’Organisation pour les œuvres transformatrices dans l’affaire Elliot McGucken c. Valnet début 2024. Dans cette affaire, un photographe nommé Elliot McGucken accusait Valnet, une société de médias de divertissement, d’avoir intégré certaines de ses publications sur les réseaux sociaux et des photographies associées à leur site web de voyage. McGucken a allégué que cette intégration constituait une violation de son droit exclusif de choisir comment présenter ses images au public en tant que titulaire des droits. Nous avons fait valoir qu’accéder à la demande de McGucken dénaturerait profondément le droit d’auteur: Cela ferait de millions d’opérateurs de plateformes des contrevenants, car cela permettrait aux titulaires de droits d’auteur d’interdire à des tiers de rediriger le public vers une œuvre déjà affichée publiquement en ligne. McGucken a finalement perdu le procès.

Les actions en justice de la Fondation s’étendent au-delà des États-Unis et visent à clarifier des lois incertaines dans le monde entier. Comme mentionné précédemment, un autre aspect de notre mission est de protéger les droits et libertés des utilisateurs du projet, où qu’ils soient, afin qu’ils puissent accéder à des connaissances libres et ouvertes et les partager. En mai 2024, la Fondation a cosigné un mémoire d’amicus curiae avec Wikimédia France, pour demander au conseil constitutionnel français d’invalider certains articles de la nouvelle loi SREN (“sécuriser et réguler l’espace numérique”). Avant même l’entrée en vigueur de la loi SREN, Wikimédia Europe et la Fondation avaient informé les législateurs français que sa portée serait inconstitutionnelle en raison d’exigences telles que: Des délais de retrait excessivement courts; des ordonnances de blocage quasi mondiales (ce qui signifie que le gouvernement français imposerait des retraits dans d’autres pays); et le risque d’amendes pénales ou d’emprisonnement pour le partage de contenus susceptibles de susciter l’indignation ou l’offense. Le conseil constitutionnel a rendu sa décision peu après, invalidant plusieurs dispositions du SREN, notamment la disposition relative à l’“outrage ou délit numérique”.

Notre mission consiste également à mettre en lumière les cas où des lois sont utilisées abusivement dans des poursuites-bâillons visant à restreindre la liberté d’expression, comme indiqué précédemment. La Fondation a plaidé devant la cour suprême de justice du Paraguay dans l’affaire Gisele Zuni Mousques contre Christian Chena en juillet 2024. Dans ce procès, Mousques poursuivait Chena pour violation présumée d’une loi paraguayenne visant à lutter contre la discrimination de genre, dans le but de supprimer des informations d’intérêt public factuellement exactes la concernant, menaçant ainsi la liberté d’expression et l’accès d’autrui à des informations fiables et exactes. Dans notre mémoire d’amicus curiae, cosigné avec TEDIC et le centre d’études sur la liberté d’expression et l’accès à l’information (CELE), nous avons soutenu que la justice de paix avait non seulement pas omis de prendre en compte les implications de la décision en matière de droits humains sur la liberté d’expression et le journalisme, mais qu’elle n’avait pas non plus appliqué le critère approprié pour déterminer si une restriction des droits humains de la partie concernée était légitime. Un critère incorrect pour restreindre la liberté d’expression pourrait avoir des conséquences sur de nombreuses affaires futures et limiter la capacité des bénévoles de Wikimédia à partager des informations publiques importantes. L’affaire est toujours en attente de jugement devant la cour suprême de justice.

Enfin, comme nous l’avons expliqué précédemment, notre mission exige que nous veillons au maintien des normes juridiques existantes et efficaces—Par exemple celles qui protègent les fournisseurs de plateformes contre des responsabilités injustifiées. La Fondation a déposé un mémoire d’amicus curiae dans l’affaire d‘Ulrich Richter Morales et Claudia Ramírez Tavera contre Google Inc. et Google Mexique devant la cour suprême de justice du Mexique en août 2024. Dans cette affaire, Ulrich Richter Morales poursuivait Google de ne pas avoir supprimé un article de blog prétendument diffamatoire sur la plateforme Blogger. Nous avons fait valoir qu’il était essentiel de maintenir les protections existantes offertes par le cadre juridique de la responsabilité des intermédiaires Internet, car elles sont essentielles au caractère collaboratif et neutre de plateformes comme Wikipédia. Cette affaire est également toujours en attente de décision devant la cour suprême du Mexique.

Conclusions

Dans l’ensemble, ces affaires présentent un paysage juridique plus complexe que jamais. Les tribunaux de nombreux grands pays sont disposés à statuer sur la compétence de la Fondation et des bénévoles de Wikimédia sur la base d’articles biographiques concernant des personnalités ou des organisations de ces pays. De plus, les procédures judiciaires sont devenues plus complexes, certains plaignants affirmant que même les informations factuelles sur Wikipédia et les autres projets Wikimédia pourraient devenir trop anciennes, trop peu pertinentes, trop inexactes, voire trop incomplètes pour permettre leur hébergement légal. Face à cette situation, la meilleure solution pour les communautés est de s’assurer que les articles sont de qualité et importants pour le grand public: Plus le contenu est clair, neutre et sert l’intérêt public, meilleure sera la défense que la Fondation peut offrir pour protéger le contenu et rejeter les demandes de divulgation de données.

Ce ne sont là que quelques exemples des affaires traitées de manière quotidienne par la Fondation Wikimédia. La Fondation, ses affiliés et alliés continuent de jouer un rôle actif dans la réalisation de notre mission: Fournir des contenus éducatifs libres et ouverts à tous. Notre engagement actif dans les litiges internationaux est l’un des principaux moyens que nous utilisons pour faire progresser le monde vers notre vision d’un savoir libre et ouvert pour tous, partout dans le monde.

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